Inclassables
par leur diversité, les Polymusicales bollénoises brassent un public
tout aussi hétérogène. Les Floraisons musicales, qui ont leur propre
festival, s’immiscent dans le magma et ciblent les mélomanes avertis.
Entre une soirée pop anglaise et une nuit disco, leur calendrier a
permis d’intercaler une oasis consacrée à Frédéric Chopin
(1810-1849). Quel bonheur !
Réservée
à l’élite (où Musset et Courteline sont par ailleurs imminents avec
le sieur Dancourt), la cour Florence Forns a rempli ses gradins. Un
auditoire de haute voltige et quelques simples curieux y attendaient de
pied ferme une gloire du clavier. On leur avait annoncé Leonel Moralès,
remplacé au pied levé par Jean-Marc Luisada, tout aussi bardé de références
dithyrambiques que son homologue. Nous ne perdions donc rien au change.
Dans
cette optique, les superlatifs sont de mise pour réaffirmer un doigté
forcément rare. Observons plutôt l’événement local et son
contexte. En coulisses, Jean-Marc Luisada nous a déclaré : «
Je suis fier d’avoir joué en un si bel endroit, devant un public
sensible. C’était l’osmose. Voilà qui donne de la liberté. »
Autrement dit, le virtuose s’est « dégrafé ».
Ses
mazurkas ont ménagé les côtés paysans et aristocratiques. Cette
dualité donne du relief à d’autres pièces dont cette
polonaise-fantaisie aux soubresauts frénétiques. Pour apaiser ce final
héroïque, illustrant la rupture amoureuse entre George Sand et Chopin,
le maître a offert en bis une ineffable sarabande puisée dans une
suite de J. S. Bach, puis l’insondable agonie de « La cathédrale
engloutie » de Claude Debussy.