Ce concert survolté à La Cigalière tranchait sur l’événement initialement programmé, axé sur les rencontres nationales bao-pao, qui ont fait étape à Bollène. Rappelons que le bao-pao est un instrument de musique à cordes laser, destiné aux personnes handicapées. Pour remercier et détendre les personnes venues participer aux tables rondes et pratiques instrumentales, l’association organisatrice La Puce à l’Oreille leur a offert un extraordinaire intermède musical : celui de la Guinguette Hot Club.

Apparu en 2015 dans la sphère de la Grosse Tambouille, ce collectif d’artistes regroupe à ce jour une douzaine de membres du Sud-est, dont cinq chanteurs et sept instrumentistes issus de l’Orchestre de la Marine de Toulon. Ils ont du tonus à revendre, et donc de quoi en offrir par mimétisme aux personnes fragilisées par un handicap. Ce processus illustre une anecdote. Jean Schmutz, concepteur du bao-pao, présent au concert, a pour fils le tromboniste de la Guinguette Hot Club, qui est ainsi venu jouer à Bollène avec sa bande de copains, chanteurs et musiciens.

Que jouent-ils ? Un florilège de tubes, puisés dans la chanson française. Cela swingue à tout va. Le rythme est tel qu’on ne reconnaît pas forcément tout de suite la source. Brassens, Piaf, Brel, Gainsbourg, Aznavour, Trenet y retrouvent une vigueur inespérée. 

L’auditoire quitte son siège et ne tarde pas à entrer dans la guinche, comme le voulaient les bals populaires d’antan. D’où le vocable guinguette, superbe anachronisme qui ravive les couleurs du répertoire.

Au cœur d’un forum destiné à dégourdir le handicap par la musique, cet intermède inespéré débloquera durablement les mémoires ankylosées.          J. P.